Dans son nouveau livre au titre évocateur, Bleuir l’immensité, Karelle Ménine partage un véritable travail d’entomologiste. Tandis qu’elle se trouvait en Valais, au Centre régional d’études des populations alpines, on dépose sur sa table deux boîtes grises. A l’intérieur, 46 cahiers d’écolier couverts d’une écriture fine qui remplit frénétiquement les pages.
Pour cette autrice et chercheuse qui dit volontiers que « une archive est une pulsion de vie », cette découverte est une aubaine. Elle se met alors à déchiffrer ces documents exceptionnels, produits au début du 20e siècle par un jeune berger valaisan qui deviendra plus tard journaliste. S’ouvre aussitôt devant nous une conquête du monde par l’écrit.
Carla Demierre mène elle aussi une enquête singulière, à partir d’archives familiales privées qu’elle mêle avec les mémoires d’une artiste peintre et médium genevoise devenue célèbre dans la première moitié du 20e siècle, Elise Müller.
Cette femme s’avère exceptionnelle non seulement par ses dons médiumniques, mais également par sa liberté et son indépendance, à une époque où les femmes sont assignées à des rôles précis. En pleine vogue du spiritisme et à l’aube de la psychanalyse, ses transes ont suscité l’intérêt des scientifiques. Après sa mort, Elise Müller a légué ses œuvres et ses archives au Musée d’art et d’histoire de Genève. Mais elles ont mystérieusement disparu… C’est sur leurs traces que Carla Demierre est partie.