À 49 ans, Eugène décide d’écrire à Nicolae Ceauşescu, dictateur roumain ayant tyrannisé sa population pendant plus de vingt ans. Pour cautériser les plaies et enfin s’adresser directement à cette présence qui fait partie de sa vie depuis toujours, dans une démarche quasiment cathartique. Il écrit alors la lettre « la plus inattendue et la plus étrange de sa vie » : la lettre à son dictateur. Il y reprend tout depuis le début de sa relation avec celui qu’il appelle par son prénom : de l’omniprésence des portraits de Nicolae dans la Bucarest de son enfance à la chute du régime en passant par sa propre arrivée en Suisse, il revient sur les événements qui le rattachent au tyran, constitutifs de celui qu’il est aujourd’hui. Jusqu’à découvrir qu’une dette insoupçonnée les lie…
Bourrée d’humour, son écriture en ligne de crête réussit la prouesse de raconter un pan tragique de l’histoire européenne récente sous un angle intime et infiniment touchant. Car Eugène parle avant tout de lui, puisant dans ses tripes pour restituer le point de vue décalé d’un enfant puis d’un adolescent et finalement d’un adulte sur son histoire familiale, entre périple identitaire et récit d’apprentissage.
Mais que l’on ne s’y trompe pas : derrière ce sujet sombre se cache un spectacle joyeux, mis en scène par Geneviève Pasquier. Après un minutieux travail de montage, cette dernière allie les morceaux du Pierre Omer’s Swing Revue au jeu du comédien Vincent Babel et passe à la scène cette lettre si singulière, dans un tourbillon festif faisant toute la place à la malice d’Eugène.