Qu’est une artiste sans son art ? Tchaïka, actrice en fin de carrière, s’apprête à jouer son dernier rôle, celui d’Arkadina dans La Mouette de Tchekhov. Seule et confuse, la vieille femme arpente le théâtre vide en récitant des bribes de son texte et en donnant réplique à ses partenaires de jeu… ou s’agirait-il plutôt des fantômes de son passé ? Tiraillée entre l’envie de perdurer et la volonté de s’éclipser d’un monde théâtral dont les évolutions lui échappent, Tchaïka navigue entre espoir et détresse, souvenir et oubli, désir et résignation, dans un élan de vie qui évoque le dernier soubresaut d’une mouette aux ailes brisées.
Sur scène, ce corps-à-corps au bord des abysses vertigineuses du déclin, est incarné par une marionnette grandeur nature, aux traits et gestes d’un réalisme troublant, portée à bras-le-corps par une comédienne seule en scène. De ce duo fusionnel, tantôt complice, tantôt révolté, émerge une pluralité de voix et de personnages réels ou fictifs, qui embarquent le public dans une chorégraphie brillamment menée, où fantasme, passé et présent s’entremêlent. Avec cette première collaboration, la marionnettiste Natacha Belova et la comédienne- metteuse en scène Tita Iacobelli livrent un hommage plein d’humanité à l’héroïsme de la vieillesse.